Transat 1° étape : la mer (le lac) des Sargasses

Vendredi 14 mai : nous mouillons à Marigot (Saint Martin), et commençons à préparer le bateau pour la transat.

Accastillage et bricole pour Ronan, avitaillement pour Béa (30 bouteilles de vin, du Saint Marcellin, de la rosette, de la roquette et plein de fruits et légumes : c'est quand même mieux que lorsqu’on part du Cap Vert...), école pour les enfants et bien sûr grandes lessives.

Nous retrouvons avec joie nos amis en attente d'une fenêtre météo pour partir directement vers les Açores : Tomadji, Sol, Zed, et, quelques jours plus tard, Blue Gate et Ahcnoc.

En fait, le port de Marigot est rempli de bateaux de voyage qui attendent autre chose que du vent de nord est.

En effet, plusieurs bateaux sont partis puis ont fait demi-tour après plusieurs jours passés à tirer des bords...

Les enfants sont donc ravis et l'on reprend les bonnes vieilles habitudes des apéros et dîners improvisés.

Samedi, Anne arrive, notre équipière pour la 1° étape de la transat (Saint-Martin-Bermudes) : de luxe car elle est aussi skipper à ses heures.

Le lendemain, c'est au tour de Tristan de partir vers Paris, bien entouré car il est dans le même avion que les enfants de Zed et Gorgan de Blue Gate.

Il sera choyé par Papi et Mamie qui nous le ramèneront à Gibraltar début juillet. Séquence émotion.

Lundi 17 mai : après quelques dernières courses et surtout une vérification de la météo à 5 jours sur weatheronline (qui s’avérera incroyablement exacte), départ au son des cornes de brume de Sol, Tomadji, Zed et Ahcnoc : sympa!

Nous partons par 25 noeuds, sur des chapeaux de roue, mais la nuit se passera au près, assez inconfortable. Nous ne sommes pas suffisamment fatigués pour bien dormir.

Le deuxième jour, le vent passe au travers et c'est vraiment mieux.

Glazik file à 8/9 noeuds et le capitaine est heureux. Nous aussi!

D'autant que vers 13 heures la ligne s’emballe : c'est certainement un gros poisson!

Anne lofe à la barre, j'enroule le génois, Corentin apporte le croc et Ronan ramène le poisson à la canne... du vrai travail d’équipe!

C'est un magnifique Thazard d'un mètre de long (au moins), nous aurons à manger pour quelques jours.

Nous allons le décliner en Thazard au curry, gratin de Thazard, soufflé de Thazard et enfin terrine de Thazard : il faut varier les plaisirs et occuper les deux cuisinières du bord (luxe!).

Le rythme s'installe : je fais le premier quart (21H-01H), puis Ronan et le lever de soleil est pour Anne.

Troisième jour : on a toujours du vent mais le baromètre remonte dangereusement : 1008, 1010, 1012 hectopascals.

Nous allons bientôt arriver sur l’anticyclone actuellement centré sur les Bermudes, ce qui n’est pas très bon pour le vent.

Nous avons fait jusque là entre 6,8 et 7,8 noeuds de moyenne mais cela ne va pas durer.

Grand beau temps, ambiance très cool à bord.

Petit coup de folie sur la musique « Scat Man » à fond : le capitaine fait des vidéos, je lui propose la musique, Anne donne son avis... toujours le travail d’équipe.

Weatheronline l'avait prédit et cela arrive : le vent tombe le 4° jour à 5/6 noeuds, Glazik file quand même à 2,5/3 noeuds, quel bateau!

Du coup le bateau est plat et, fait unique en traversée, nous dormons à l'avant.

Au réveil, Alix résume bien la situation : "il y a pétole, maman!"

Vers 10 heures, plus un souffle. Nous sommes au milieu d’un immense lac que nous renommons bientôt le lac des Sargasses.

Cette mer chaude à la salinité élevée permet le développement d'une faune et flore très particulières que nous voyons flotter à la surface : des curieux mollusques ressemblant à des demi bouteilles d’eau avec un aileron, ainsi que des crustacés et des larves qui vivent dissimulés sous des algues brunes, flottant sur d'immenses étendues.

Le capitaine cède aux éléments et se décide à mettre le moteur. 4 heures seulement, heureusement un souffle revient car plus de 4 heures, c'est vraiment trop dur a supporter(!)

Activité aquarelle : Corentin et Alix ont commencé à s'y mettre, comme Tristan, aux îles Vierges et font de très beaux dessins. Anne s'y met aussi et bien sûr le capitaine, qui est rompu à la technique.

Quant à moi, plus douée pour la cuisine, j’invente la recette du pain brioché, pas mal non plus mais un peu plus éphémère.

Il commence à faire frais la nuit et nous ressortons les couettes, les polaires et les écharpes pour les quarts.

5° jour : le vent revient! Nous avons bon espoir d’arriver demain, sauf rechute de vent. Mais la météo prise au départ s'avère toujours aussi exacte et le vent, sans être très virulent, ne nous lâchera plus, l'anticyclone se déplaçant maintenant vers les Açores.

Changement d'amure grâce au vent d'ouest, une première depuis 8 mois que nous sommes portés par les alizés d’est.

Fin de la dernière déclinaison du Thazard.

18H : re-poisson: Ronan en effet était interdit de pêche jusqu'à hier, mais maintenant il faut assurer les protéines du bord et cela a l'air bien parti.

Malheureusement, malgré notre technique aguerrie et nos efforts répétés, c’est le thon qui est plus fort et il repart à l'eau, au grand désespoir du capitaine.

Nous nous voyons déjà ouvrir les boîtes de thon de la cambuse quand, une demi-heure après, re-poisson, grâce à Anne qui a insisté pour qu'on remettre la ligne malgré le crépuscule : c’est un superbe thon (rouge cette fois), qui devrait nous faire quelques bons repas aux Bermudes.

6° jour : au petit déjeuner, nous croisons à 90 degrés un énorme pétrolier, suffisamment près pour voir très distinctement son énorme vague d’étrave.

Vers midi, contact VHF avec "Bermuda Harbour Radio", qui nous pose toutes sortes de questions sur l'équipement du bateau, le nombre de personne d'équipage, etc...

Passage du chenal qui commence, fait rare, à plusieurs milles du bord : les récifs des Bermudes sont réputés mondialement et tout est extrêmement bien balisé.

Ils ont également défini une zone dangereuse appelée "area to be avoided", où aucun navire n’est autorisé.

Tout navire n’allant pas vers les Bermudes est cordialement invité à rester à plus de 30 milles des côtes !

Après un bon déjeuner de lasagnes au thon, nous partons avec Anne faire connaissance avec la terre.

Le premier contact est excellent : ce sont les plus gentils douaniers que nous ayons rencontré, notre séjour commence bien.

A suivre dans une prochaine édition !

 
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